Les jeux et la mère indigne

Ce matin, j'ai été une mère indigne.

Il y a plein de raisons d'être une mère indigne mais ce qui m'ennuie avec cette raison là, c'est qu'elle revient souvent et qu'elle fait naître en moi une grande culpabilité.

Ce matin, la Castafiore a été globalement sage. Nous avons quand même eu droit -je vous rassure- à deux belles grosses crises bien sonores. La première parce que je suis en train de trier ses vêtements de façon à mettre de côté ce qui est trop petit. Ce n'est pas ça qui l'agace mais ce tri fait ressurgir tout un tas de petits vêtements oubliés qu'elle tient absolument à essayer. Ce matin, elle avait jeté son dévolu sur un maillot de bien une pièce, taille 2 ans (alors qu'elle s'habille en 4 ans). Sentant l'inévitable énervement venir (mais quelle est donc cette figure de style? Un bonbon pour celui qui trouve!), j'ai refusé qu'elle l'enfile. Je l'imaginais déjà hurlant en tirant sur les bretelles, trop courtes pour parvenir à enfiler ledit maillot jusqu'en haut. Après quelques protestations, elle a changé de tactique et a tourné les talons en direction de sa chambre puis... plus un bruit. C'est généralement très mauvais signe quand on n'entend plus un enfant mais la Castafiore n'est pas du genre à faire de grosses bêtises, alors mon côté bouddhiste m'a soufflé de "laisser cette enfant s'épanouir et de profiter de ce temps calme pour faire mon ménage dans la plénitude". Mon côté bouddhiste est un peu fracassé des fois et a une grande confiance en l'être humain, si petit soit il. Force est de constater que cette fois ci, il n'a pas eu complètement tort de laisser courir (d'autres fois cet excès de confiance n'est pas une réussite, je vous en reparlerai). La Castafiore n'a pas fait de grosse bêtise. Ni même de petite à vrai dire. Elle était simplement allée essayer les maillots de bain qui se trouvent dans son placard, en taille 4 ans. Tant pis. Même si elle a mal enfilé celui avec une jupette et qu'elle s'est baladée avec les fesses à l'air parce qu'elle avait mis les deux jambes dans la jupette mais pas dans le slip intégré. Oui, tant pis.

Mais quand elle a viré au glaçon parce qu'en plus d'être fesses à l'air et épaules nues, elle marchait pieds-nus sur le carrelage comme si elle était à la plage, j'ai bien été obligée de lui demander de se rhabiller. Et quand elle a remis son pantalon, sans culotte, par dessus son maillot de bain jupette, j'ai bien été obligée de prendre les choses en main. Parce qu'elle n'avait pas du tout l'intention d'enlever le maillot de bain. LE-DRAME.

Après l'épisode du maillot de bain, la Castafiore a voulu jouer à la balle avec Chat Bagali. Soit. Mais d'après elle Chat Bagali voulait plus de balles. La Castafiore semble être un peu manipulatrice. C'est moche de se servir d'un animal sans défense pour arriver à ses fins, mais bon, aucun animal n'a été blessé lors de cette deuxième crise. Voilà donc le sol de ma salle à manger jonché de pas moins de 6 balles à grelot et d'une souris à plumes et la Castafiore fière de son coup, qui se met en tête d'utiliser finalement les balles pour sa maison de poupées. Sauf que quand l'une des balles s'est retrouvée coincée dans la poubelle à couvercle jaune de la maison de poupées (oui, la poupée est sensibilisée à l'environnement; elle trie ses déchets et possède une poubelle pour les déchets recyclables), la Castafiore n'a pas supporté. Aussitôt, elle a appelé sa maman adorée avec sa jolie voix aimable de poissonnière (pardon aux poissonnières). Ces hurlements aggressifs ont le don de me hérisser le poil. Cent mille fois déjà, je lui ai demandé qu'elle viene me voir et qu'elle me demande gentiment de l'aider mais rien n'y fait. Elle continue à vociférer, moi au rez de chaussée, elle à l'étage, et on a de la chance si l'hsitoire ne se termine pas avec une tête tapée contre un mur ou un effondrement violent au sol. Folle de rage, elle a finalement consenti à venir me voir, toujours en hurlant, et après un câlin pour la calmer tout en lui expliquant ce que j'attendais d'elle pour la cent millième et une fois, j'ai ôté cette odieuse et effrontée balle de la poubelle de recyclage.

Mais je m'étale là, et je n'en viens pas au fait. Après cette matinée, nous avons mangé dans le calme puis, peu après être sortie de table, la Castafiore est venue me voir et du haut de ses 3 ans m'a dit "j'sais pas quoi faire". Coup de massue sur mon petit crâne déjà bien turlupiné par la culpabilité. Parce que c'était vrai, elle avait joué toute la matinée, seule, et pas une minute je n'avais joué avec elle.

Elle ne me l'avait pas demandé, certes, mais je m'en veux toujours quand je constate que je n'ai pas joué avec mes enfants. Je m'occupe bien d'eux, je pense. Du moins, je veille à ce qu'ils mangent équilibré, qu'ils soient polis (c'est pas encore toujours au point), qu'ils ne manquent de rien, qu'ils comprennent toujours le travail fait en classe quitte à passer du temps à leur réexpliquer, qu'ils fassent de bonnes nuits... mais jouer, c'est rare.

En fait, il faut bien l'avouer, j'ai horreur de ça. Je me force quand même régulièrement mais ça ne loupe jamais, j'ai soudain un coup de barre monumental. L'ennui sans doute.

Je détestais jour aux petites voitures avec Préado et la Framboise. Mais je me disais que quand j'aurai une fille, ce serait sans doute top de jouer à la poupée.

Et bien non. C'est casse-pieds.

Avec le bébé : "Tiens Maman, mets lui sa couche", "Maman, c'est toi qui lui donnes le biberon", "Maman, tu mets son pyjama à mon bébé?".

Faire semblant de jouer à la dinette, ce n'est pas mieux : avaler 50 fois l'air de ma tasse de thé en plastique me file de l'aérophagie.

Et avec les Barbies ou les petites poupées mignatures, je ne sais pas pourquoi mais en ce moment, il faut toujours qu'elles volent pendant des plombes et ça me donne des crampes au bras, de voler des heures comme ça. Ce ne sont même pas des Barbies fées, elles n'ont pas d'ailes. Alors pourquoi elles volent? Les enfants sont bizarres.

Préado et la Framboise ont abandonné l'idée de jouer aux petites voitures avec moi. Parfois je joue à la console, mais ça me gonfle vite parce que je ne joue pas suffisamment souvent et que je ne maîtrise pas la manette et ses commandes et puis aussi un peu (et peut-être surtout) parce que je perds, vu qu'ils sont bien plus forts que moi.

J'aime bien jouer à des jeux de société à l'occasion. Mais pas tous. Le jeu de l'oie m'ennuie prodigieusement et le mille bornes finit invariablement en pugilat dès que l'un ou l'autre de mes grands se fait distancer ou prend un pneu crevé. Combien de fois le plateau de jeu a voltigé sous la colère de la Framboise? Je ne sais plus mais bien trop. Autant dire que je réfléchis à deux fois avant de m'engager dans un jeu.

Le souci, c'est que tout cela me fait culpabiliser. J'aime partager des activités avec mes enfants. Nos séances de cinéma sont peut-être encore plus un plaisir pour moi que pour eux. Mais les jeux, c'est bien compliqué.

Et sinon, avant la sieste de cet après-midi, on a fait un puzzle des princesses ensemble. Quand même...

Qui aime ça, jouer avec ses enfants?

Comments

[Chumette]

Une petite pensée pour nos mères que nous avons soûlées pour jouer avec nous... Maintenant tout s'éclaire !

[Véro]

Pas moi, ça me gonfle !